Tous les acteurs y ont mis du leur
« Nous sommes satisfaits du travail qui a été entamé et d’avoir réussi ce pari extraordinaire d’avoir connecté plus de 400 sociétés d’exercice libéral et plus 3 900 sites. Le tout en tenant des délais extrêmement contraints. Les biologistes ont joué leur rôle de manière efficace. Nous avons essayé d’être pragmatiques quitte, parfois, à simplifier certaines demandes pour que les biologistes puissent y répondre et les prendre à bras le corps. » Le satisfecit du Président du SDB, François Blanchecotte, n’a rien d’usurpé. SI-DEP est le fruit d’un « effort exceptionnel de toutes les parties prenantes, lequel a rendu les choses possibles », renchérit le Docteur Bruno Coignard, Directeur du service des maladies infectieuses de Santé publique France. Tous - biologistes médicaux libéraux et hospitaliers, directions du ministère de la Santé, éditeurs de logiciels, société de services, AP-HP, Assurance maladie, Agence du numérique en santé, Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) et, bien sûr, Santé publique France - y ont mis du leur pour que le SI-DEP voit le jour le 13 mai après seulement deux petits mois de développement. « Ce qui est assez fantastique », insiste Bruno Coignard.
Petit rappel historique
Un petit rappel historique s’impose toutefois pour expliquer dans quelle mesure le SI-DEP s’inscrit dans le dispositif des maladies à déclaration obligatoire (au nombre de 34) instauré en…1892, à l’époque, sous la forme de cartes postales et autres lettres. Aujourd’hui, c’est principalement le formulaire Cerfa qui a cours quand bien même l’enjeu est-il de se débarrasser du papier en généralisant la dématérialisation des déclarations et d’abord de certaines d’entre elles comme le VIH et bientôt la tuberculose.
Toujours est-il que les LBM apportent « une contribution majeure à ce dispositif par le diagnostic biologique qu’ils rendent chaque jour et par leurs déclarations », rappelle le Docteur Coignard. Illustration avec le Système 3labos mis en place par Santé publique France, en 2006 et activé en routine depuis 2012 avec comme partenaires deux laboratoires de spécialités (Cerba et Eurofins-Biomnis) rejoints, en 2020, par Inovie. Une initiative à triple visée : d’une part, améliorer la surveillance existante en termes de complétude, d’exhaustivité et de couverture d’autres maladies pas à déclaration obligatoire ; ensuite, récupérer davantage de données individuelles ; enfin, appliquer le process dit de machine-to-machine reporting, lequel limite la charge de travail des déclarants (dont les biologistes) et sécurise les échanges. Les résultats ne se sont pas fait attendre avec la constitution de données consolidées concernant une quinzaine de maladies infectieuses (arboviroses, maladies respiratoires ou à prévention vaccinales , IST parasitoses zoonoses etc.) « Ce système est très efficace et permet de rattraper un certain nombre de diagnostics qui n’avaient pas fait l’objet d’un signalement », confirme Bruno Coignard.
Pourquoi SI-DEP ?
Seulement voilà, le Covid-19 est passé par là et même si le stade 3 de la pandémie a induit l’inclusion du Covid-19 au dispositif 3labos ainsi qu’une surveillance multisource (services des urgences, données de SOS Médecins et du réseau Sentinelle etc.), « on s’est rendu compte que cela ne pouvait pas suffire, précise le Docteur Coignard. Il fallait une couverture beaucoup plus exhaustive de l’ensemble des tests Covid réalisés sur l’ensemble des territoires. » D’où le SI-DEP, lequel ne s’adresse pas qu’aux laboratoires de spécialité mais à tous les LBM de France et de Navarre. Cet outil a vocation à faciliter la diffusion de tous les résultats issus des RT-PCR et des sérologies pratiqués en France mais surtout à mieux contrôler l’épidémie (en débouchant sur le contact tracing systématique et l’isolement de tous les cas confirmés) et à assurer, sur la base de données pseudonymisées, un suivi de cette dernière. Avec, à la clef, la production de nombreux indicateurs épidémiologiques (taux de positivité, incidence des cas de Covid-19, R effectif, cartographies…) et la détection des clusters.
Une base accessible
Le SI-DEP s’articule autour de quatre composantes qui ont respectivement trait à la phase préanalytique, aux laboratoires qui effectuent les tests, à l’agrégation des résultats et enfin, aux destinataires de ces informations (ARS, Cnam, médecins prescripteurs, patients etc.) Il s’agit en effet de les rendre accessibles à tous ceux qui en besoin, par exemple, dans le cadre de travaux de recherche, à l’heure du lancement de l’Identifiant national de santé (INS). Le tout de manière très sécurisée et encadrée de la Cnil.
Les données colligées sont versées dans Health Data Hub. Préalablement, elles sont monitorées, chaque jour, par l’équipe qui en a la charge, le prestataire du SI-DEP étant l’AP-HP. Ce flux continu est l’objet d’un contrôle qualité et d’une vérification mais également d’une analyse sept jour sur sept par Santé publique France. Les indicateurs sont ensuite transmis quotidiennement aux décideurs (DGS, Matignon, ARS…). Ils demeurent consultables en permanence en ligne et sont repris dans les points épidémiologies nationaux et régionaux de Santé publique France et d’autres organismes.
Et après ?
Santé publique France autant que le SDB aspirent à étendre SI-DEP à d’autres pathogènes (HPV). Ce qui induit que la plate-forme ne cessera pas de fonctionner avec la fin de l’épidémie. Bruno Coignard tient, au contraire, à consolider pour de bon cet « accélérateur de progrès dont le mot d’ordre n’est pas la centralisation mais le partage ». « Notre volonté, assure-t-il, est de pérenniser le dispositif et de ne pas perdre cet acquis, fruit d’une mobilisation exceptionnelle des acteurs », assure le Directeur du service des maladies infectieuses de Santé publique France. Un sentiment pleinement partagé par le SDB qui souhaite également que Santé publique France reste au cœur du réacteur afin qu’il continue à n’y avoir qu’un seul tuyau par lequel transitent ces si précieuses données de santé.
Santé Publique France par qui tout passe
Créée en 2016, Santé publique France résulte de la fusion de l’Institut de veille sanitaire (INVS), de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus) et d’Addictions drogues alcool info service (Adalis). Sa mission fondatrice se décline autour de plusieurs axes : anticiper et détecter les risques sanitaires ; comprendre et améliorer les connaissances de l’état de santé de la population et des risques ; surveiller l’ensemble des pathologies ; agir en mettant en œuvre des campagnes de prévention et de promotion de la santé ; mener des investigations et répondre aux situations sanitaires exceptionnelles.
Son budget est de 195,5 millions d’euros tandis que son siège est implanté à Saint-Maurice dans le Val-de-Marne. L’Agence compte quinze antennes régionales. Ses partenaires composent un réseau de santé publique dont font évidemment partie les biologistes médicaux.